Je ne pense pas que nous allions à contre-courant

Marc Arand, Group CEO of Banque Havilland.

Photo: Matic Zorman / Maison Moderne

La Banque Havilland a annoncé la vente de ses activités de banque institutionnelle à Banco Inversis. Marc Arand, le CEO du groupe, nous explique les raisons de cette transaction, les objectifs de la banque et partage sa vision de la banque privée.

De nationalité allemande, Marc Arand a été nommé directeur général du groupe Banque Havilland le 1er avril 2022. Groupe qu’il a rejoint au moment de sa création en 2009, et où il a occupé différentes fonctions, notamment celle de directeur général de la filiale Banque Havilland (Liechtenstein) AG. Il est diplômé en économie bancaire de l’école de finance de Francfort.

Marc Fassone: Qu’est-ce qui vous a amené à céder vos activités bancaires institutionnelles à Banco Inversis?

Marc Arand: «Je pense qu’aujourd’hui les banques comme la nôtre doivent s’assurer qu’elles se concentrent sur leur proposition de service et s’efforcent de la fournir au plus haut niveau d’excellence. Lorsque je suis arrivé au Luxembourg en avril dernier en tant que CEO, nous avons décidé de nous concentrer sur l’activité de banque privée, conformément à notre nouvelle stratégie, ‘Excellence 2024‘. Nous avons mis à plat toutes nos activités et avons conclu que les activités bancaires institutionnelles n’entraient plus dans notre cœur de métier.

“(…) nous avons décidé de nous concentrer sur l’activité de banque privée, conformément à notre nouvelle stratégie, ‘Excellence 2024‘. Nous avons mis à plat toutes nos activités et avons conclu que les activités bancaires institutionnelles n’entraient plus dans notre cœur de métier.”

MARC ARAND

En vendant ces activités, n’avez-vous pas le sentiment d’être à contre-courant alors que beaucoup de banques font de ces métiers un levier de croissance complémentaire?

«D’une part, les domaines d’activité sont complémentaires, d’autre part, ils diffèrent considérablement dans les détails. Une partie de notre concept doit consister à s’adapter rapidement aux nouvelles conditions du marché, ce qui est beaucoup plus facile à réaliser avec une orientation claire.

Je ne pense pas que nous allions à contre-courant, bien au contraire. Pour des banques ayant un positionnement comme le nôtre, l’important est de ne pas se disperser et de s’assurer que le service que vous fournissez à vos clients privés est meilleur que celui de vos concurrents.

Pouvez-vous détailler les tenants et les aboutissants de votre stratégie, «Excellence 2024»?

«Banque Havilland a sa maison mère ici au Luxembourg, une filiale au Liechtenstein, une à Monaco et une succursale en Suisse. Nous employons au niveau du groupe 190 personnes, dont 130 au Luxembourg. Nous sommes positionnés sur tous ces marchés où nous pensons qu’il y a un fort potentiel de croissance pour l’avenir. Et où nous pouvons aussi prendre des parts de marché en étant plus performants grâce à nos services. Et pour ce qui est de notre zone de prospection, l’Europe est notre objectif premier.

‘Excellence 2024‘ a été conçu en 2022 pour être appliqué en 2023 et évalué en 2024 avant d’être éventuellement amendé. Sa philosophie est de s’assurer que notre offre de service apporte de l’excellence au client. Cette stratégie repose sur trois piliers: les talents que nous devons acquérir, l’infrastructure informatique qui doit nous permettre d’être plus agiles et l’intégration dans notre modèle opérationnel et dans notre offre de produits des pratiques ESG. Ce que je peux déjà vous dire aujourd’hui, c’est que les mesures que nous avons prises l’année dernière ont déjà un effet positif sur notre performance financière pour cette année. Et que le premier trimestre 2023 a été meilleur que prévu.

Quels sont vos principaux défis aujourd’hui?

«Je pense que nos défis sont communs à ceux de toute l’industrie. Il y a d’abord la maîtrise des coûts – et pas uniquement les coûts règlementaires toujours en hausse – dans un contexte de diminution des marges. Ce qui rend nécessaire l’investissement dans les technologies de l’information. Face à la double concurrence des grandes banques internationales et des banques locales, vous ne pouvez survivre que si vous adoptez des processus allégés et efficaces soutenus par la numérisation.

Le deuxième élément de différenciation, c’est le service. Aujourd’hui, la croissance des activités ‘discrétionnaires’ et des commissions se réduit au profit des activités purement de conseil.

Enfin, il y a l’acquisition et la rétention des talents. Le fait que nous soyons une banque à taille humaine et de proximité ouvre des opportunités que les grandes institutions ne peuvent pas offrir de la même manière: un rôle responsable avec la possibilité d’apporter une forte contribution personnelle et d’avoir une progression de carrière rapide. Prenons mon exemple: j’ai commencé à travailler dans la banque au moment de sa création et j’ai occupé plusieurs fonctions importantes au sein du groupe avant de devenir directeur général du groupe. Je pense que cela peut motiver les gens. Nous les soutenons dans leur parcours professionnel en leur proposant des formations qui leur permettront d’acquérir de l’autonomie et des responsabilités – l’autonomisation est l’une de nos valeurs fondamentales.

On parle beaucoup actuellement de concentration, de rentabilité et d’obtention de la masse critique. Y a-t-il une place à long terme pour un établissement comme le vôtre?

«Oui. Nos clients ont des relations bancaires avec de grandes banques, mais aussi avec de plus petites. Des banques comme la nôtre qui les servent sinon mieux, du moins en leur proposant un service plus personnalisé, des solutions taillées sur mesure. Beaucoup de gens recherchent cela. Et c’est ici que nous pouvons nous différencier des grands acteurs de la banque privée. En étant plus petits, nous sommes plus agiles pour nous adapter aux tendances du marché et aux exigences de nos concurrents.»

(source: Delano and Paperjam)